dimanche 22 août 2010

Moisson du fourrage

Aussitôt les grosses pluies terminées et le choc de la catastrophe absorbé, les habitants de Matho se sont mis à l’ouvrage. Il faut couper l’herbe qui servira de nourriture aux animaux pendant toute l’année. Dans certains champs, on ne trouve que ces herbes et pas d’autres cultures. Sur le bord d’autres champs plantés de céréales comme dans le pourtour des jardins potagers, sous les abricotiers, on coupe ces plantes variées et fleuries partout où elles se trouvent. Pas de tracteur ni aucune autre machine agricole, tout se fait à la main. En général, les hommes, genoux à terre, manipulent la faucille, et les femmes font des ballots avec l’herbe coupée. Mais, par manque d’hommes, qui travaillent souvent à l’extérieur, on peut voir des femmes se servir également de la faucille. Pendant 2 jours et demi, j’ai aidé 3 familles différentes dans les champs, en confectionnant les ballots. Il faut d’abord faire une torsade de plantes qui sert ensuite à attacher le paquet d’herbes ensemble. Cela paraît si facile… mais il faut un peu de pratique avant d’y arriver.
Ce qui est extraordinaire dans ce travail, ce sont les chants qui accompagnent le labeur tout au long de la journée. Ils ne ressemblent à rien de ce que je connaissais auparavant. Les travailleurs se divisent en 2 groupes non fixes, qui se répondent et répètent des phrases telles que : « lami lamo ton-lé », ce qui signifie que le travail est facile. Au fur et à mesure que les heures passent, le ton change, le rythme aussi, l’entrain évolue également, ce qui fait que la chanson est toujours différente. Nous faisons de nombreuses mais courtes pauses. Nous buvons du thé, les hommes préfèrent le « chang » (boisson légèrement alcoolisée fabriquée dans chaque maison à partir d’orge), dans lequel ils mettent une poignée de « gnampé » (farine d’orge grillée). Certaines femmes en boivent aussi un peu. À chaque pause, les hommes affutent leur faucille avec une pierre de la rivière. En général, une femme prend soin de tout le monde. Elle s’assure qu’il y ait assez de « chang », prépare les différents thés (le salé et le sucré), une grosse collation vers 11h ou 12h, puis le repas qui est servi dans le champs en début d’après-midi.
Une fois les ballots d’herbe confectionnés, on les met debout, 3 par 3. Et le travail ne s’arrête pas là : après cette journée de coupe, il faudra revenir les chercher. Les ladakhis utilisent comme un sac à dos une longue sangle, grâce à laquelle ils peuvent transporter de grosses quantités d’herbe. Ils les rapportent jusqu’à leur maison, puis les montent sur le toit pour les y faire sécher.
Quand on a travaillé toute la journée aux champs avec les ladakhis, leurs chansons résonnent encore dans la tête au moment de se coucher, et bercent un sommeil de plomb. Il s’agit d’une expérience merveilleuse et d’un privilège que de partager avec eux des moments pareils.










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