Dans le village de Saboo, à la place de ce tas de roches, se trouvait une maison. Elle a disparu la nuit du 5 au 6 août. 4 de ses habitants y ont trouvé la mort, incluant une femme enceinte.
Dans le village de Matho, une seule maison s’est écroulée, ne faisant aucun blessé. Une trentaine de voisins se sont portés bénévoles pour en sortir tout ce qui était récupérable.
Maison enterrée jusqu'au premier étage à Saboo.
Le Ladakh a connu des heures sombres, au début août. De violents orages se sont abattus sur la région pendant plusieurs nuits d’affilée. Le Ladakh étant un territoire très aride, les maisons ne sont pas construites pour être à l’épreuve de telles précipitations ; elles sont faites de briques de terre, leur toit est plat, recouvert de terre, et souvent une partie en est ouverte sur l’intérieur de la maison. Lors de ces orages, il a donc plu dans la plupart des maisons ladakhis, et j’ai dû déménager dans la chambre du rez-de-chaussée que j’occupais l’année passée. Ce n’est qu’un tout petit inconvénient par rapport à ce qui s’est passé aux alentours…
Le pire est survenu lors des 2ème et 3ème nuit de déluge. À Leh et dans une vingtaine de villages, de nombreuses maisons se sont écroulées, parfois sur leurs propriétaires. Des coulées de boue ont emporté des vies et rempli des maisons entières, les rendant inutilisables. Tous les ponts de la route reliant Leh au Cachemire ont été détruits. Les dégâts sont innombrables. Maintenant que tout est terminé, on a retrouvé environ 200 corps, 600 personnes sont encore disparues, et les blessés sont très nombreux. Pour une région dont la population est de 150 000 habitants, le bilan est lourd. D’autant plus que, de mémoire de ladakhi, même chez les plus âgés d’entre eux, jamais une catastrophe de cette ampleur n’est survenue parmi ce peuple.
À Matho, il a aussi plu dans les maisons, mais les dégradations ont été vraiment minimes. Une seule vieille maison s’est écroulée dans tout le village, sans faire aucun blessé. Avec une trentaine de voisins, je suis allée aider les propriétaires à en sortir tout ce qui était récupérable : matériaux de construction (poutres, baguettes de bois, portes, fenêtres, escalier, briques de terre …), poêle à bois, vaisselle (principalement en métal, mais une cuvette remplie de tasses de porcelaine intactes a été sortie des décombres, une seule d’entre elles étant cassée), objets divers, et surtout le plus important, les réserves de grains et de farines.
Le village de Matho a été bien épargné par les événements. Les villages dévastés sont situés partout autour de Matho et de Stok, miraculeusement épargnés. Des habitants de Leh et de Choglamsar sont venus plusieurs soirs d’affilée passer les nuits, en sécurité, au monastère de Matho. Plusieurs habitants du village, quant à eux, ont installé des tentes dans les montagnes : ils avaient peur que leur maison ne s’écroule sur eux pendant leur sommeil.
Le service de bus pour aller à Leh a été interrompu pendant une semaine. Les enfants n’ont pas eu d’école puisque les professeurs ne pouvaient pas venir. Les lignes de téléphone fixe ne fonctionnent pas depuis 2 semaines, et les téléphones portables ont eu bien des problèmes également.
Le 11 août, une centaine d’habitants de Matho se sont regroupés dans les bennes de 2 camions, armés de pelles et de pioches, pour aider les habitants d’un village dévasté : Saboo. Je faisais partie du nombre. Tristesse et désolation nous attendaient dans ce village qui devait être si paisible et agréable en temps ordinaire. Une nuit, un torrent est soudainement passé en plein cœur du village, un chemin qu’aucune rivière n’emprunte en général. Le flux était si important qu’il charriait avec lui des roches de toutes tailles, allant jusqu’à peser plusieurs tonnes. Les dégâts sont terribles : maisons écroulées, coupées en 2, remplies de terre et de pierres, presque comme du béton armé. Là où étaient les champs et les jardins potagers verdoyants, il ne reste qu’un désert de roches.
Nous avons d’abord travaillé à essayer de dégager une maison intacte : l’amas de terre et de pierres s’amoncelait jusqu’au premier étage. Le long de la maison se trouvait, sous un autre tas, les restes de l’étable et de 3 vaches.
Puis, avec mes amies, nous sommes allé aider à dégager les décombres d’une autre maison, dont il ne restait pas grand chose : d’un côté, les restes d’un petit magasin, de l’autre, 2 pièces défoncées, remplies de terre compactée et de roches. Entre les 2 était située une autre partie de la maison, totalement disparue et impossible à imaginer sous cette rivière de décombres et de roches. Toute la journée, entre 10 et 20 personnes ont travaillé dur pour en sortir quelques objets et essayer de consoler la propriétaire malchanceuse : 2 matelas et les 2 tapis que l’on place dessus, 2 sacs de jute remplis de vaisselle de métal terriblement cabossée, quelques coussins… La récolte est minime par rapport à la somme de travail, mais pour quelqu’un qui a tout perdu, c’est déjà quelque chose.
Un peu plus haut, en fin d’après-midi, un Rimpoche (Lama haut gradé) est venu prier sur un amas de grosses pierres. J’apprends qu’à cet endroit se trouvait une maison (difficile à croire : on ne peut en distinguer que des fondations d’un seul côté), et que, cette nuit-là, 4 personnes de la même famille y ont trouvé la mort, incluant une femme enceinte. Au total, 14 personnes sont mortes dans le petit village de Saboo.
À la nuit tombante, les 2 camions nous ont ramener, brinquebalant, à Matho. Malgré la fatigue d’une journée de dur labeur, la désolation et la tristesse de tout ce qu’ils ont vu, les habitants du village où j’habite ont gardé leur joie et leur bonne humeur habituelle. Pendant la plus grande partie du trajet, comme à l’aller, ils ont chanté une prière bouddhiste. Une fois de plus, les ladakhis m’ont donné une leçon de courage et de solidarité.
Le pire est survenu lors des 2ème et 3ème nuit de déluge. À Leh et dans une vingtaine de villages, de nombreuses maisons se sont écroulées, parfois sur leurs propriétaires. Des coulées de boue ont emporté des vies et rempli des maisons entières, les rendant inutilisables. Tous les ponts de la route reliant Leh au Cachemire ont été détruits. Les dégâts sont innombrables. Maintenant que tout est terminé, on a retrouvé environ 200 corps, 600 personnes sont encore disparues, et les blessés sont très nombreux. Pour une région dont la population est de 150 000 habitants, le bilan est lourd. D’autant plus que, de mémoire de ladakhi, même chez les plus âgés d’entre eux, jamais une catastrophe de cette ampleur n’est survenue parmi ce peuple.
À Matho, il a aussi plu dans les maisons, mais les dégradations ont été vraiment minimes. Une seule vieille maison s’est écroulée dans tout le village, sans faire aucun blessé. Avec une trentaine de voisins, je suis allée aider les propriétaires à en sortir tout ce qui était récupérable : matériaux de construction (poutres, baguettes de bois, portes, fenêtres, escalier, briques de terre …), poêle à bois, vaisselle (principalement en métal, mais une cuvette remplie de tasses de porcelaine intactes a été sortie des décombres, une seule d’entre elles étant cassée), objets divers, et surtout le plus important, les réserves de grains et de farines.
Le village de Matho a été bien épargné par les événements. Les villages dévastés sont situés partout autour de Matho et de Stok, miraculeusement épargnés. Des habitants de Leh et de Choglamsar sont venus plusieurs soirs d’affilée passer les nuits, en sécurité, au monastère de Matho. Plusieurs habitants du village, quant à eux, ont installé des tentes dans les montagnes : ils avaient peur que leur maison ne s’écroule sur eux pendant leur sommeil.
Le service de bus pour aller à Leh a été interrompu pendant une semaine. Les enfants n’ont pas eu d’école puisque les professeurs ne pouvaient pas venir. Les lignes de téléphone fixe ne fonctionnent pas depuis 2 semaines, et les téléphones portables ont eu bien des problèmes également.
Le 11 août, une centaine d’habitants de Matho se sont regroupés dans les bennes de 2 camions, armés de pelles et de pioches, pour aider les habitants d’un village dévasté : Saboo. Je faisais partie du nombre. Tristesse et désolation nous attendaient dans ce village qui devait être si paisible et agréable en temps ordinaire. Une nuit, un torrent est soudainement passé en plein cœur du village, un chemin qu’aucune rivière n’emprunte en général. Le flux était si important qu’il charriait avec lui des roches de toutes tailles, allant jusqu’à peser plusieurs tonnes. Les dégâts sont terribles : maisons écroulées, coupées en 2, remplies de terre et de pierres, presque comme du béton armé. Là où étaient les champs et les jardins potagers verdoyants, il ne reste qu’un désert de roches.
Nous avons d’abord travaillé à essayer de dégager une maison intacte : l’amas de terre et de pierres s’amoncelait jusqu’au premier étage. Le long de la maison se trouvait, sous un autre tas, les restes de l’étable et de 3 vaches.
Puis, avec mes amies, nous sommes allé aider à dégager les décombres d’une autre maison, dont il ne restait pas grand chose : d’un côté, les restes d’un petit magasin, de l’autre, 2 pièces défoncées, remplies de terre compactée et de roches. Entre les 2 était située une autre partie de la maison, totalement disparue et impossible à imaginer sous cette rivière de décombres et de roches. Toute la journée, entre 10 et 20 personnes ont travaillé dur pour en sortir quelques objets et essayer de consoler la propriétaire malchanceuse : 2 matelas et les 2 tapis que l’on place dessus, 2 sacs de jute remplis de vaisselle de métal terriblement cabossée, quelques coussins… La récolte est minime par rapport à la somme de travail, mais pour quelqu’un qui a tout perdu, c’est déjà quelque chose.
Un peu plus haut, en fin d’après-midi, un Rimpoche (Lama haut gradé) est venu prier sur un amas de grosses pierres. J’apprends qu’à cet endroit se trouvait une maison (difficile à croire : on ne peut en distinguer que des fondations d’un seul côté), et que, cette nuit-là, 4 personnes de la même famille y ont trouvé la mort, incluant une femme enceinte. Au total, 14 personnes sont mortes dans le petit village de Saboo.
À la nuit tombante, les 2 camions nous ont ramener, brinquebalant, à Matho. Malgré la fatigue d’une journée de dur labeur, la désolation et la tristesse de tout ce qu’ils ont vu, les habitants du village où j’habite ont gardé leur joie et leur bonne humeur habituelle. Pendant la plus grande partie du trajet, comme à l’aller, ils ont chanté une prière bouddhiste. Une fois de plus, les ladakhis m’ont donné une leçon de courage et de solidarité.
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